Contribution de Bernard Lamizet :
Ont nous rappeler qu’en habitant un pays, nous appartenons à l’espace social qu’il institue : comme d’autres, la Poste est une médiation : une relation constante entre le singulier et le collectif.
Par ailleurs, la Poste est un des derniers remparts qui nous protègent de l’invasion du libéralisme. C’est en fréquentant la Poste, en utilisant ses services, que nous manifestons notre attachement à une approche de la société qui échappe aux lois du marché, à la concurrence et au libéralisme : en ce sens, la Poste est une des garanties dont nous disposons de l’égalité sociale. C’est la raison pour laquelle les menaces qui pèsent sur la Poste rejoignent celles qui pèsent sur l’énergie comme sur le transport, notamment sur le rail : la libéralisation du service postal aurait le même sens que celle du chemin de fer et des entreprises de distribution de l’énergie, celui d’une soumission de notre vie quotidienne aux impératifs du marché.
Sans doute cette confrontation entre la Poste et le libéralisme du marché vient-elle de loin. En effet, elle a d’abord pris la forme de la séparation de la Poste et des Télécommunications mise en œuvre sous la direction de Paul Quilès, ministre des Postes et Télécommunications dans le gouvernement de Michel Rocard, en 1990. Cette séparation revenait à scinder le service public de la Poste en deux entreprises, et, ainsi, à mieux l’inscrire dans les logiques libérales du marché. Mais, pour mieux comprendre le rôle politique de la Poste et l’importance de son maintien dans les institutions de l’État, il faut remonter à sa fondation. En effet, c’est sous le règne de Louis XI que la Poste naît en France : son rôle est alors de fonder dans la vie quotidienne l’unification du territoire. La Poste est, ainsi, depuis le début, un des acteurs majeurs qui fondent l’identité du pays. C’est dire son importance et, aussi, l’importance de ne pas la soumettre au marché.