Interview de l’Hebdomadaire Le Patriote Côte d’Azur :
Le Patriote : Que vouliez-vous prouver par l’organisation d’un Forum Alternatif au Forum dit officiel ?
Christian PELLICANI :
Nous voulions montrer que l’eau n’est pas une marchandise, mais un bien commun. Et que ceux qui se font les chantres de la gestion de l’eau sont en fait des marchands d’eau déguisés. Que le Conseil mondial de l’eau, qui a organisé à Marseille le 6e Forum Mondial de l’Eau (FME), est en vérité le regroupement des multinationales de l’eau.
Et proposer avec le FAME un forum citoyen, ouvert à tous, avec une cinquantaine d’ateliers accessible au grand public, aux spécialistes, élus, syndicalistes et associatifs pour des échanges d’expériences, de luttes, de solidarité et de solutions alternatives, tant pour la gestion de l‘eau que pour l’assainissement.
Le Patriote : Mais que reste-t-il une fois les portes du Docks refermé sur le FAME ?
Christian Pellicani : Nous avons gagné la bataille des idées sur trois questions :
– La délégation de service public (DSP) dénature le service public en donnant une dimension marchande à la gestion de l’eau. Nous avons fait reculer l’image bienfaitrice des DSP ici, en France, mais aussi dans le monde. Les délégations de plus de 80 Pays qui se sont croisées dans les ateliers du FAME sont reparties avec des éléments de déconstruction du discours libéral dans les domaines de l’eau et de l’assainissement.
– Nous avons largement écorné la façade du Conseil Mondial de l’Eau en montrant au grand public le vrai visage de cette association qui n’est pas une émanation de l’ONU et ni un organisme inter gouvernemental. Mais seulement la vitrine commerciale des multinationales emballées dans un verni de personnalités caution d’un marketing international.
– Enfin, de nombreuse ONG ont fini par prendre conscience du rôle de faire valoir qu’ils étaient amenés à jouer en participant à cette mascarade à la dimension planétaire. De fait le prochain sommet mondial à RIO pour examiner les engagements sur le développement durable devra faire une plus grande place aux populations et leurs formes de représentation.
Le Patriote : Mais encore, quels seront les prolongements concrets ?
Christian Pellicani : Là encore nous pouvons en pointer plusieurs :
– La volonté de poursuivre en trouvant une forme d’organisation qui rendra pérenne l’intervention des mouvements qui refuse la marchandisation des services de l’eau et d l’assainissement. Une ébauche européenne et en cours de constitution autour des ONG européennes constitutive de la coordination Eau bien Commun. Le Réseau Homme&Nature du MNLE y participera au même titre que les collectifs d’Attac et de la Coordination Eau Ile de France avec des ONG et Syndicats européens.
– Cette nouvelle page d’une forme d’organisation européenne sur l’Eau va surement trouver une expression publique à Rio en juin 2012 et surement à l’automne dans les couloirs du parlement européen pour influencer les travaux de l’assemblée sur la réforme de la « LEMA » et les directives sur l’eau.
– Les conclusions du FAME ouvrent sur la création d’un espace permanent international autour de la création d’un tribunal de l’Eau avec des objectifs concret qui seront portés au niveau de la cour européenne des droits de l’homme mais aussi au niveau de la commission des droits de l’homme des nations unis.
Le réseau Homme&Nature sera l’une des chevilles ouvrières de la construction d’une juridiction internationale dont la première réalisation sera présentée en septembre dans le Val de Marne dont le Conseil général a pris une part active au trois ateliers de préfiguration d’un tribunal international. Une deuxième présentation sera également faite en équateur et une troisième dans le sud de l’Italie dans la même période afin de donner une dimension internationale à ces travaux.
– Sans parler parmi les multiples projets celui de la confection d’Acte du FAME d’ici la fin de l’année.
Le patriote : En conclusion, quelles leçons tirez-vous du FAME ?
Christian Pellicani : L’organisation du FAME a mis en évidence les convergences d’actions et d’idées de nombreux mouvements, associations, syndicats et forces politiques.
Les organisateurs ont démontré la véracité du dicton : « l’union fait la force ».
Nous avons eu un succès quantitatif et qualitatif qui doit nous faire réfléchir aux immenses possibilités des nouvelles formes de rassemblement qui doivent trouver un débouché politique. La question de la constitution de Front et des convergences sur des propositions partagées s’imposent !
Enfin, pendant quatre jours au Docks des Suds, dans la diversité on a assisté à la mise en pièce du système capitaliste et de la libéralisation des services publics : un vent d’espoir international à souffler dans Marseille.
A partir de cette expérience donnons du volume et de la force à toutes nos ambitions sociales et environnementales.