Rassemblement de protestation Marseille/Vieux Port
Samedi 10 septembre, 15h
Discours d’inauguration de la « Rue de la Spéculation » ex rue de la république.
Par le maire de Marseille, Claude Jean Dingo
Mes chers administrés
Je ne cacherai mon très grand plaisir de partager avec vous ce moment historique sur le renouveau de Marseille.
En effet en tant que 1er magistrat de cette ville que j’aime, je vais aujourd’hui inaugurer, en la rebaptisant, cette merveilleuse artère qui naguère, au moment de son percement dans la seconde moitié du 19ème siècle, s’appela la rue IMPÉRIALE, qui fut dénommée ensuite rue de la RÉPUBLIQUE (mais…liberté, égalité fraternité,… que reste-t-il aujourd’hui de ce concept poussiéreux, dépassé ?) artère qui aujourd’hui prend le nom prestigieux, et combien moderne à l’heure de la mondialisation, de rue de la SPÉCULATION.
Permettez-moi d’emblée de remercier ici les divers sociétés financières qui ont concouru à ce grand renouveau et qui m’ont aidé à éloigner de notre centre ville cette population impécunieuse, de peu d’intérêt pour nos finances publiques (elles coûtent et ne payent pas d’impôt) mais aussi peu attractives pour les grandes chaînes commerciales qui attendent autour des centre villes rénovés l’occasion d’étendre leurs affaires et d’augmenter leurs profits.
Vous l’avez compris, c’est ça le développement ! Et qu’on ne me raconte pas d’histoires sur les habitants victimes des opérations de rénovation urbaine!!!
Pour la rue de la République, nous avons établi depuis plus de 7 années avec ces grands investisseurs une relation fondée sur des intérêts réciproques bien compris :
– Moi, Claude Jean Dingo, premier magistrat de cette ville, avec l’appui de ma majorité et grâce au silence relatif d’une partie de mon opposition, j’ai fait le choix, pour changer le visage et l’image de Marseille, de m’appuyer sur les talents des fonds de pension et des sociétés financières à qui j’ai offert, en réponse à leurs exigences, les aides publiques nécessaires pour qu’ils puissent réaliser de substantiels profits, sans contreparties et sans trop de risques.
– Eux, les Fonds de pensions et les sociétés immobilières, ont fait preuve, avec leurs hommes de mains, de leur efficacité et de leur savoir faire pour mettre en œuvre, chacun à sa manière, les méthodes qui s’imposaient pour balayer ce tissu social encombrant, nettoyer les façades et proposer à des gens convenables, dotés de moyens financiers, des appartements à acheter au prix d’au moins 4 000 euros le m2 ou à louer à des montants de loyer 3 fois supérieurs à ce qu’ils étaient antérieurement.
Ainsi faisant, ils pouvaient réaliser de juteuses affaires …bien sûr !
Cette magnifique opération, conduite en toute transparence, j’ose le dire aujourd’hui, j’en suis très fier !!!
Je vais vous donner quelques éléments du bilan de cette opération de rénovation de la rue de la République, bilan pour la ville, mais aussi pour les investisseurs eux-même.
J’aborderai successivement 4 volets de ce bilan : celui du nouveau visage de la rue de la République ; puis celui de la revitalisation de l’économie et des affaires dans ce quartier de Marseille ; je vous donnerai ensuite quelques informations sur les profits qu’en retirent nos amis les investisseurs ; enfin, mais je ne développerai pas, j’évoquerai la question de la situation des habitants de ce quartier après 7 années de conduite de cette grande opération de rénovation.
1 Les façades d’abord. Elles ont retrouvé leur allure impériale.
Certes, me direz-vous, pas toutes ! Puisque des îlots entiers concernant + de 600 logements sont vidés de leurs habitants et non rénovés. Vous comprendrez bien que la crise de nos pauvres finances est passée par là en 2008. Atemi Lehman Brothers s’est effondré, peu après avoir racheté au Fonds de pension américain la moitié de son patrimoine immobilier non rénové après 4 années de « dur labeur » pour vider les habitants et les commerçants.
2 Les commerces nouveaux ensuite. Vous le constatez vous-même : ce sont maintenant les grandes marques, ceux qu’on appelle les franchisés, qui ont pris la place des anciennes échoppes minables dans les bas des immeubles d’Eurazéo ANF, entre le Vieux Port et la place Sadi Carnot à quelques 400 m d’ici même. On me dit que les affaires ne sont pas excellentes pour ces nouveaux commerçants…crise oblige ! Mais enfin soyons confiants : quand la rue de la spéculation sera enfin remplie de riches consommateurs ça ira mieux pour le commerce… Vous savez,…. la loi de l’offre et de la demande… !
Certes me direz vous encore :
Et tous les petits commerces et artisans qui ont disparu entre Sadi Carnot et la Joliette entre 2004 et aujourd’hui, laissant la rue désertifiée, sans vie, aux rideaux baissés défigurant les bas d’immeubles comme après un ouragan.
Là, je vous le dit : Ne vous inquiétez pas ! Je m’ensuis occupé personnellement. J’ai demandé à nos amis investisseurs, qui en ont pris l’engagement, d’installer des immenses panneaux aux couleurs chatoyantes pour cacher les anciennes boutiques et donner une apparence de rénovation en cours. (D’ailleurs vous irez voir ; je crois qu’ils ont commencé à le faire)
Je vous rassure donc, et je m’y engage solennellement devant vous : pour 2013, année où Marseille sera Capitale de la Culture, le monde entier aura les yeux sur les façades brillantes et le décor des bas d’immeubles. On ne leur donnera pas le spectacle de ce qui se passe et surtout de ce qui ne se passe pas derrière les façades.
Ce qui compte, mes amis ce sont les apparences !
3 Les profits maintenant. Eh bien, croyez-moi, les investisseurs n’ont rien à regretter ! Voyez la Lone Star : Ce fonds de pension qui a pris le nom de « Marseille République » (son siège est au Luxembourg, …ça n’est pas innocent !) achète en juillet 2004, pour 115 millions d’euros, 1350 logements et 50 000 m2 de surface commerciale. En mars 2008, 4 ans après, Marseille République disparaît après avoir rénové et vendu à la découpe seulement 1/5 ème de ses appartements au prix fort et après avoir cédé la moitié de ses immeubles (environ une centaine, ceux là non rénovés !) à son homologue américain Atemi-Lehman Brothers à un prix moyen bien supérieur au prix d’acquisition (c’est normal ! il les avait vidés de leurs habitants et avaient chassé les petits commerces).
Et bien, ce fonds de pension, la Lone Star, a réalisé près de 90 millions d’euros de bénéfice en 4 ans, soit 18% de taux de profit annuel, juste ce qu’exigeaient ses actionnaires !
4 Enfin, les habitants. Alors là ! n’allez pas écouter les sirènes des gauchistes ou autres associations qui veulent que le centre ville soit pour tous. Ces gens là vous savez, ils n’ont rien à proposer. Ils sont incapables d’entrer dans l’ère moderne des affaires.
Ils disent que des habitants on été exclus par les violences et pressions exercées à leur encontre ; ils disent qu’il y a des vieilles personnes qui sont mortes avec la perte du lien social et de la solidarité, que d’autres sont partis, exclus par la loi du marché avec la hausse des loyers. Pire !ils ont aidé certains habitants à résister et ça a créé bien du soucis aux opérateurs de la rénovation en retardant l’avancée des chantiers ;
Moi je vous dis :
oui il y a eu quelques ratés à cause de la crise ;
oui beaucoup de logements sont vacants et non rénovés ;
oui, la rue est bien moribonde avec ses commerces disparus et ses habitants dispersés……
Mais enfin, n’est-ce pas là le prix à payer pour avoir notre ville de Marseille en phase avec l’ère de la spéculation triomphante !
Mesdames et Messieurs, chers amis, chers administrés, le temps et venu d’afficher devant les agences de notation et devant tous les affairistes du monde entier la nouvelle appellation de cette artère qui retrouve son prestige sous le nom de « Rue de la Spéculation ».